Isis
Panopticon - CD
Ipecac 2004


Panoptique. Qui permet de voir sans être vu. Se dit d'un bâtiment aménagé de tel sorte qu'on puisse, de n'importe quel endroit de celui-ci, en embrasser par la vue tout l'intérieur. Isis ne choisit pas ses noms d'album au hasard. Après Oceanic qui traduisait la monotonie des grandes étendues sans ses reliefs, Isis aborde ce troisième album sous tous les angles, sous tous les champs. Musique totale. Le son, les compositions, les énergies motrices, tout a été pensé pour vous cerner, vous envahir. Quelque soit l'endroit où vous vous situez, qu'importe l'approche que vous en avez, Isis vous surveille, vous plonge dans une bulle architecturale élaborée dans ses moindres détails. Quelque peu suspicieux sur toutes ces musiques actuelles qui tentent de marier la puissance du metal/hardcore et les longues plages ambiantes, je dois m'avouer vaincu par la maestria de Isis qui trouve enfin le parfait équilibre. Un travail de production énorme. Les guitares sonnent comme jamais. Un grain, on pourrait presque les toucher, leur présence, juste dans votre dos, à vous faire frissonner d'extase. Une dynamique de sons et de structures. Le synthé a le souci de la précision, orne et infiltre les compos tout en finesse. Les coups de basses, quand le temps est à l'orage, sont monstrueux. Et la voix de Aaron Turner, sur un album majoritairement instrumental, a la décence de laisser son background hardcore en veilleuse et apporte une chaleur insoupçonnée. Isis s'éloigne de son influence majeur Neurosis. On se croirait parfois revenu en pleine époque noisy-pop à écouter ses nappes de guitares (Wills Dissolve). On se surprend à écouter une ligne de basse très The Cure sur "In Fiction", être aux aguets sous une pression contenue ou éclatée comme la fin cataclysmique de Grinning Mouths ou Isis retourne sur le bûcher! Quand bien même sur certains morceaux le rythme est peu soutenu du début à la fin, Isis trouve une pulsation interne qui évite l'ennui. Certes, ils ne nous épargnent pas quelques longueurs mais au contraire de groupes comme Cult of Luna, ils ne perdent que rarement le fil de leur intensité. Ils tissent patiemment un album mélodique, sombre, rageur, aérien et puissant. Toute une panoplie d'émotions contradictoires. La grande force de cet album. Entre le premier album Celestial et Oceanic, Isis remet les choses à sa place et trouve sa voie. Les My Bloody Valentine du métal !

SKX (30/11/2004)