INK
Reagent Specs - CD
Monitor 2001

La vérité est autrement différente. L'intime conjonction avec l'étendue. Les faux-semblants, la pénombre, le non-dit, l'art du contre-pied. Ink est une subtilité musicale, un objet bizarre, le truc qu'une écoute distancée suffirait à jeter aux oubliettes. Sur les épaules de Ink semble être tombée toute la torpeur du monde. Une lassitude, une nonchalance inquiétante. Sur les cendres de Candy Machine, Lyle Kissack (batterie) et Peter Quinn (chant) continuent de creuser leur tombe aux contours déjà dessinés sur un premier album dangereusement attirant. Avec Craig Bowen (guitare), ce trio originaire de Baltimore, aidé par quelques compagnons d'infortune, fait office d'extra-terrestres dans le paysage musical actuel. A demi-mesure, ils pratiquent la musique du souffle et de la retenue. Le rythme est fluide, ponctué d'un léger groove hypnotique, comme un UI au ralenti. La guitare au jeu complexe et légèrement cacophonique tisse un univers stressant. Le timbre de la voix est gaie comme un Ian Curtis en chaleur. Et fragile comme un futur suicidé. C'est le Velvet Underground maladif et épuré. Des ambiances chloroformées de prime abord, une légèreté qui annonce une tempête qui ne vient jamais. Mais c'est tout tendu là dedans, une musique poil à gratter, irritante et entêtante. Qui vous colle peu à peu à la peau. Le tas informe que je suis se propulse à grand-peine. C'est Slint dans l'esprit avec des armes différentes et variées (clarinette, violon, piano, etc...). Ne jetez pas à la vindicte publique après une seule écoute. Ne zappez pas. La musique introspective de Ink mérite du temps, de l'attention. Et vous rentrerez alors vous aussi dans ses structures décalées comme quand on aime se faire peur. Des mœurs d'un autre âge, ce charme exotique, faussement froid mais tendre à l'intérieur. Imprimez vous ce nom dans la tête et chérissez ce groupe à nul autre pareil.

SKX (13/05/2002)