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Frank, à l'origine de Gaffer records et d'une multitude de groupes dont les chroniques ornent régulièrement ce site, est un personnage quasi incontournable de la scène noise-expérimental, en France mais aussi à l'étranger où il se produit fréquemment avec notamment Weasel Walter et Mario Rechtern. Après des années d'activisme forcené (le bougre organise également des concerts sur Lyon), c'était le moment de faire le point et faire plus amples connaissances. Est-ce que tu te rappelles de la première fois où tu as joué d'un instrument ? Je ne te demande pas de remonter jusqu'au collège et les cours de flûte, sauf si ça été une révélation pour toi, ou remonter encore plus loin dans ta jeunesse, sauf fait majeur, mais ta première expérience dans un groupe (ou tout seul déjà ?), comment c'était, où... bref tout sur tes grands débuts de musicien dans la grande histoire du rock'n'roll ?! C'est assez
vieux quand même...J'ai commencé la guitare vers 15/16 ans
et très vite, avec des potes, on à monté des petits
groupes. C'est quoi la musique qui t'a donné envie de créer la tienne, qu'est ce que tu écoutais avant de jouer dans ton premier groupe ? Vers 12/13
ans, avant de commencer la musique, je skatais beaucoup. Et c'est en regardant
les vidéos de skate à l'époque que j'ai découvert
les groupes qui m'ont ensuite poussé à faire de la musique
et même influencé. Je me souviens particulièrement
de la vidéo "Street on fire" de Santa Cruz (1989 si je
me souviens bien) dans laquelle j'ai entendu Sonic Youth pour la première
fois. Les morceaux Catholic Block et White Cross m'ont vraiment
marqué. Ensuite j'ai débuté la guitare avec tous
les groupes de métal (au sens large) de l'époque : Metallica,
Iron Maiden, Anthrax, Megadeth... Par contre
SoCRaTeS c'est fini... en quelque sorte. On n'a jamais dit que le groupe
était mort, mais c'est impossible de continuer. Les emplois de
temps très divergents, les motivations, les modes de vie... tout
ça fait que SoCRaTeS est en stand by, pour une durée "indéterminée". Alors, j'ai
fait le tri il n'y a pas longtemps. C'était nécessaire.
J'ai donc stoppé Hallux Valgus (trio noise/ no wave avec Pavel,
ex Death To Pigs, La Race...), Kandinsky (trio free jazz/ noise) et -1
(duo noise/ rock expé avec Damien Grange, ex-Chewbacca, Rature,
300mA...). Et pour répondre
à la 2ème partie de la question, ce qui me pousse à
commencer un nouveau projet n'est pas vraiment défini. Un besoin
à l'instant même, un feeling avec d'autres musiciens, une
"lubie" ... Je pense que c'est assez logique en fait. Comme beaucoup de musiciens, j'apprécie plusieurs styles de musique parfois très différents les uns des autres... et donc impossible à faire coïncider dans un même groupe. A moins de s'appeler Mister Bungle, mais tout le monde n'est pas aussi doué qu'eux. Alors la solution c'est de multiplier les projets. Et puis il y a un tas de musiciens avec qui j'aimerais jouer, mais on ne peut pas tous jouer ensemble dans la même formation. Es-tu aussi un boulimique de consommation de musique, dans le sens que tu as besoin d'en écouter beaucoup, pour t'inspirer à créer la tienne, pour te tenir au courant de ce qui se fait ? Oui j'en
écoute ENORMEMENT ! Mais comme beaucoup de gens, les finances ne
suivent pas. Du coup je télécharge beaucoup et j'ai tout
le temps le casque de mon lecteur mp3 rivé sur la tête. C'est
effectivement pour me tenir au courant de ce qui se fait, déterrer
des vieux disques à coté desquels je suis passé,
me donner des idées, etc. Les groupes
dans lesquels je joue sont très différents, donc la question
ne se pose pas trop... et la plupart sont basés sur de l'impro
et là, pas de soucis de riffs non plus. Ah oui ça me stimule beaucoup! Ca ne m'apporte pas les mêmes sensations ni les mêmes satisfactions que de jouer en groupe, mais le solo est une sorte de "challenge". J'essaie de repousser mes limites tout en gardant une cohérence musicale et en évitant le coté "démonstration" du solo. C'est vrai que ça demande de la concentration, c'est assez fatiguant moralement mais c'est aussi plus gratifiant quand ça fonctionne. Maso? peut être...mais ça fait partie du processus, non? Par contre,
le fait de jouer en groupe m'apporte plus de liberté, de légèreté
et aussi le simple fait de partager avec d'autres. J'ai monté
Gaffer pour sortir le premier disque de SoCRaTeS, un CD 3" sans titre.
A partir de là tout s'est enchainé, le label a évolué
pour devenir ce qu'il est aujourd'hui. L'idée de monter ce label
est venu d'une discussion avec Matt (qui chantait dans KIRUNA, un groupe
lyonnais de noise rock), un ami anglais qui vit à Lyon et dont
le surnom est... the Gaffer. Au départ
oui, il y avait Load, Skin Graft, Tzadik... mais aujourd'hui ça
n'est plus le cas. Je pense que Gaffer Records à maintenant une
identité propre (enfin je l'espère...) et je tente de conduire
le label "à ma façon". Bah je n'ai
pas vraiment de critères, c'est juste une question de goût.
Ca me plait, je le sors (enfin si j'ai les finances bien sûr...).
Il y a les groupes ou musiciens avec qui je souhaitais bosser comme Mats
Gustafsson, Weasel Walter, Offonoff, Jazkamer, Moha!... et puis ceux qui
m'ont envoyés des démos qui m'ont plu comme STAER, Colin
Webster, pier... Il n'y a pas vraiment de ligne directrice mais il est
vrai qu'inconsciemment les artistes Gaffer Records ont des trucs en commun
: un coté noise, brut, improvisé, une musique exigeante...même
si ça parait un peu "pompeux" dit comme ça. Non, pas du tout. Faut dire que je n'essaie pas vraiment pour l'instant. Si je pouvais en vivre, ça serait super mais çà n'est pas un but en soi. Je n'ai pas envie de faire les concessions qui pourraient me permettre de vivre de la musique. Surtout en France, j'ai l'impression que ce système d'intermittent est très contraignant et ça ne me branche pas du tout! Toi qui consacre tout ton temps à la musique, tu t'y investies énormément, ça serait quoi ta vie parfaite de musicien ? Je me rends
compte que j'en suis pas loin de ce qui pourrait à mon sens être
la vie parfaite du musicien. Je fais la musique que je veux, sans concessions,
je peux jouer à peu près partout dans le monde (au prix
d'efforts et d'une patience sans limite pour caler des dates quand même...
50 mails = une date, alors quand tu veux te caler une petite tournée,
fais tes comptes.), j'ai mon propre label pour sortir mes disques - même
si je suis ouvert à toutes propositions venant d'autres labels
que ma musique intéresserait. Des concours?
de blast beat? avec Weasel? mais t'es MALADE??!!? il me défonce
en blast beat... On parle pas vraiment de batterie... et je ne suis pas
un "vrai" batteur, ce qui fait que je ne parle jamais matos...ça
ne m'intéresse pas du tout. Le matos de guitare non plus d'ailleurs...
Avec Weasel en fait on raconte beaucoup de conneries... On reparle souvent
de cette anecdote qui dit que Weasel lui-même prétendrait
être le batteur le plus rapide du monde. Il nie avoir dit ça
mais ça le fait beaucoup rire. Trop Bien!
J'adore voir les disques Gaffer en partage sur le net. Le but est de diffuser
de la musique, non? Je me dis que les disques se vendront toujours, pas
de soucis. C'est long mais ça part. Je regarde régulièrement
sur Soulseek ou sur les blogs de "partage", ça me fait
plaisir. C'est de la pub pour le label, pour les groupes, tout ça
est très bénéfique. Il n'y a que pour le porte monnaie
que ça ne l'est pas, mais bon si je voulais faire des thunes avec
le label, je ne ferai pas ce genre de musique assez peu accessible. Oui, mais
ça vient du fait que la musique que j'aime et que je pratique (à
part quelques un de mes projets) est peut être plus exigeante qu'avant.
Et le réseau n'est pas le même. Alors ce n'est peu être
pas très représentatif. Mais effectivement, comme le milieu
du disque, celui du concert et de la tournée se sont durcis. Les
gens ont moins d'argent, vont moins aux concerts, les orgas sont plus
"frileuses"... Mais il est toujours possible de faire un tas
de choses, c'est loin d'être mort quand même. Pas trop de
soucis. Oui, mais
j'ai l'impression que ce problème n'est pas si français.
Certains pays comme les pays Scandinaves, l'Allemagne, la Hollande sont
plus ouverts et soutiennent la culture - aussi alternative soit elle.
Mais j'entends des tas d'histoires de lieu qui ferment ou qui galèrent
un peu partout en Europe. Le Grnd Zero c'est quand même spécial.
La ville est complètement dépassé par le truc, ils
ont le cul entre 2 chaises, soutenir ou évincer le Grnd Zero? La
tendance change tout le temps. Aux dernières nouvelles, la situation
pourrait bouger favorablement, mais rien de concret alors je préfère
ne pas en parler pour ne pas porter la poisse. Non, ça ne me dérange pas, même si je trouve ça étrange que les gens pensent que j'ai appelé le label d'après mon nom de famille. Mon vrai nom de famille c'est Garcia... mais Garcia Records ça craint, on est d'accord. Sinon les
projets en tant que musiciens c'est d'abord une tournée avec LOUP
en juin dans l'est de l'Europe (Berlin, Varsovie, Vienne... toutes les
infos seront sur le site sous peu - www.loupduo.fr) pour la sortie de
notre 2ème disque qui se fera le 17 juin à Lyon. Coté label, on prépare 2 nouveaux CD pour la Free Jazz CD series avec Akode (4tet anglo-norvégien avec Alan Wilkison) et Bolide (groupe anglais avec de forts relents d'Art Ensemble of Chicago). Puis le LP Noir de Marteau Rouge (groupe du talentueux et déjanté Jean François Pauvros), puis l'édition vinyle du Cataclysm des Flying Luttenbachers (avec en plus de Weasel Walter les incroyables Mick Barr - Orthrelm, Krallice... - et Ed Rodriguez - Deerhoof). Après, on verra. Et puis il
y aura le Gaffer Fest début octobre (dates à confirmer,
mais peut être les 11, 12 et 13 octobre) avec Marteau Rouge, The
Pitch, Bolide, Chevignon, et d'autres surprises... |