<16|10|2009> Revendications

Si une bonne année commence par de bonnes résolutions, une bonne rentrée commence par de bonnes revendications.
Ceci est donc un appel à tous les groupes, labels, manageurs(es) et autres pourvoyeurs de musique gratuite sans pochette ou dans un vulgaire carton non recyclable (et c'est bien dommage vu la finalité de l'objet) :
Merci de ne plus envoyer à ce modeste zine tout ce qui ressemble de près et même de loin à…. à quoi ?? Je ne sais même plus comment qualifier ce truc là, toute cette musique post-heavy instrumentale, du post tellement post-rock qu'utiliser le terme rock est une infamie, tous ces plans merdiques dans le sillage de Isis, tous ces plans soporifiques qui prennent leur ennui pour de la béatitude, leur pathos pour du désespoir, leur sécheresse créative pour de la magnificence et leur trou du cul pour le centre du monde.
Sans oublier tous ces putains de dinosaures que l'on croyait dépecés à jamais, tout ces relents de prog-rock seventies qui sent des dessous de bras, ce nouveau hard-rock des temps modernes qui posent derrière leurs tatouages une attitude hardcore alors que leur seul désir est de jouer dans les stades de foot une musique pour camionneurs aussi insipide et boursouflée que leur aînés.

Vous n'aurez donc pas droit à une chronique du maître en la matière, les grands Isis. L'archétype du groupe qui avait très bien débuté sa carrière et qui n'a pas su s'arrêter à temps, tombant, avec leur dernier album en date Wavering Radiant (Conspiracy records, 2009), dans la tarte à la crème et l'auto parodie. L'exemple même du consensus mou.

Idem pour Heirs (Denovali / Exo records, 2009), présenté pourtant comme le mariage parfait entre l'ombre et la lumière, la douleur et le désespoir de la dépendance contre l'exaltation de la liberté. Humour, quand tu nous tiens. Certes, Messieurs les Australiens (et la demoiselle à la basse), l'expression de vos sentiments exacerbés est retranscrit à merveille, on en pleurerait presque. On a entendu pire dans le style Explosions in the Sky en pleine descente de caisson d'oxygène (et quand ils parlent des Swans comme influence, j'ose espérer qu'ils parlent de la mélasse pseudo-mystique de Gira et ces comiques troupiers quand ils touchaient le fond de leur carrière). Mais pourquoi alors ai-je toujours la désagréable sensation d'écouter la bande-son d'un reportage de Nicolas Hulot sur le spectacle sans cesse féerique de la Nature ? Et avoir des envies de tisane après ?

Passons à la vitesse supérieure. Celle où la notion de limite est dépassée, c'est-à-dire celle où le ridicule ne tue même plus. On en deviendrait presque admiratif. Je veux bien croire qu'on ne s'éclate pas tous les jours en Normandie mais bordel, quand on a 20 piges, qu'est ce qu'on fout à mettre de l'imagerie religieuse sur sa pochette et sans second degré, coller des paroles dont la lecture fait peur (La musique, fils d'Ariane, tant de voies, de lueurs (…) par mes peurs, âme profonde, un ange pleure…) et de pondre une musique de bonnes sœurs ??!! Ya un truc que je ne comprends plus. Ou alors c'est ça, j'ai franchi le fossé, je suis devenu un vieux con et je ne comprends plus la jeunesse. Fini le rock, fini le majeur levé, place à Alkalys et son album Chœur Delys (Basement apes ind. 2009), à la musique plate, vide et creuse, pire qu'une huître de Cancale après la marée noire. L'invitation au voyage sonore quand l'âme se rit de l'espace et du temps comme il le suggère dans leur prétentieuse bio n'est qu'une vaste fumisterie, leur guitare délicieusement folle (à mettre dans mon top ten direct des meilleurs expressions) est un pet sur une toile cirée et la seule chose que leur musique me suggère, à part l'ennui, est un grand abattement. Et une bonne crise de rire. Merci quand même.

Dans un tout autre genre mais au résultat final identique, vous avez le deux titres de Izah et son autoproduction composée de Finite Horizon et Crevice, soit vingt-deux minutes et des brouettes qui sont au hardcore ce que André Rieux est à la musique classique. Oui, la Hollande est aussi à l'honneur dans cette rubrique.

Quant à la Suisse, elle aura également droit de citer avec When Icarus Falls. Le label Get a Life ! nous avait déjà fait le coup avec Equus et The Evpatoria Report, il en remet une couche avec Over the frozen seas, soit trois titres de dix minutes chacun qui ne réchaufferont pas, c'est certain, les océans. Mer calme et morne plaine, rien ne bouge. Get a life ! qu'ils disent. C'est ce qu'on aimerait leur crier. Qu'il se passe quelquechose, qu'un minimum de vie se dégage de cette musique incolore, qu'on soit remué, en bien ou en mal mais que les tripes soient sur la table bordel !

Le bouquet final revient à la Belgique. L'Europe a vraiment du bon. Et retour à Conspiracy records, un label réputé pour son amour inconsidéré pour les musiques instrumentales, ambiantes et progressives (ils cumulent les tares mine de rien). Tout n'est pas à jeter dans leur catalogue, on leur doit quelques bonnes sorties (Knut, Shora, Maninkari, Rubbish Heap) mais il faut bien avouer que depuis deux, trois ans, c'est un label sur lequel je décroche. Ce n'est pas avec Master Musicians of Bukkake et leur album Totem One que leur cote va remonter. Le trip Katmandou, la danse de la pluie, l'invocation des forces cosmiques et la fusion avec la nature, même par sa face sombre, très peu pour mon karma. Un collectif de neo-babos de la cote nord-ouest américaine qui donne dans le rituel. Ils ont beau appelé ça No-Age, ce n'est ni plus ni moins que de la triste et pénible musique New-Age pleine de psychédélisme enfumé. Chez Conspiracy, ça tourne sévère aussi.

Si ces quelques lignes ne vous suffisent pas, vous pouvez lire des chroniques , et encore . Elles ont le mérite de détendre l'atmosphère et de bien cerner le problème.

En attendant, la revendication commence à porter ses fruits puisque ainsi, vous avez pu échapper à quelques mots doux sur le dernier album de Switchblade et son chandelier qui jamais ne viendra apporter la lumière à ces obscures pages de grincheux.

Mais vous barrez pas, j'en ai pas fini. Parce qu'on aurait très bien pu insister avec l'album The White face of Alison K. par Sons of Frida sorti il y a presque un an. La France sait y faire aussi en post pas rock du tout et ces huit titres, malgré quelques décharges et accélérations qui les sauvent du pire, vous font sentir comme un passager sur un tapis roulant du métro ornant la pochette intérieure. Des moutons qui suivent le troupeau, au coude à coude, foule droit devant elle à l'aveuglette, ne surtout pas chercher à sortir du chemin.

J'ai toujours soupçonné Constellation records d'être un repère de bobos, fréquentant trop les écoles d'art et prônant la révolution de salon. Mais tant qu'ils nous donnaient du Godspeed you, du Hanged Up ou le dernier Dead Science, on fermait les yeux. Leurs dernières sorties nous les réouvrent. Et là, on voit quoi ? Rien mais on entend hélas parfaitement les vocalises de Elfin Saddle (le duo Emi Honda et Jordan McKenzie) sur leur album Ringing for the begin again ou la rencontre de Enya, du théâtre Nô et du folk bucolique rempli d'instruments aussi hétéroclites qu'inutiles que Efrim Menuck (Silver Mt. Zion, Godspeed You) a vainement tenté de tirer de sa léthargie. Autant dire que c'était peine perdue d'avance.

Avec le Clues et son premier album self-titled, on nage déjà en eaux plus troubles. Trouble dans le sens où tout n'est pas à jeter. Ce fut pourtant le premier réflexe. Le fait de lire sans doute qu'un ancien Arcade Fire se cache derrière la batterie. Mais si ces deux groupes canadiens partagent une certaine idée de l'indie-rock matinée de folk, le Clues le fait beaucoup plus au cordeau, plus sec, plus tendu. En clair, plus rock. Avec des morceaux presque convaincants et tubuesques comme Remember severed head et Approach the throne naviguant au milieu d'autres titres plus poussifs que je zappe allégrement. Faut pas pousser non plus. Clues joue avec le baroque sans jamais tomber dedans, le mélancolique mais pas le mièvre (In the dream). Merde, c'est que j'arriverais presque à apprécier cet album ! Clues, c'est un peu la version indie de 31Knots. Précieux, chiadé, orchestré mais juste ce qu'il faut avec son lot de bonnes mélodies et d'explosions, de la pop music de bonne facture et ambitieuse pour faire en sorte qu'on refermera encore à nouveau les yeux sur tout ce que Constellation peut avoir d'agaçant.

Si Clues a su rester du bon coté de la barrière de l'acceptable de mes faibles capacités en la matière, Tartufi est passé outre. Leur album Nests of Waves and wire sur Southern records découle d'une démarche identique mais le résultat est trop plein de sirop. Un duo de San Francisco qui donne l'impression d'être 20 là-dedans, plein de rythmes multiples, de percussions, de carillons, de l'acoustique à se pincer les fesses, des chants qui déboulent de partout et qui font pas mine, le truc qu'on peut taxer d'ambitieux (j'ai hésité avec le terme mature), ça se croise, ça s'envole et puis surtout ça s'écrase sur un lit de pop psychédélique moitié seventies, moitié pénible. 31Knots peut dormir tranquille.


Japanther est le symbole même du groupe foutraque qui profite à fond de la démocratisation des techniques d'enregistrement pour sortir dans les huit albums en autant d'années d'existence. Et on ne compte pas les singles et autres conneries sur des compilations. L'archétype également du groupe arty (New-York oblige ?) qui n'hésite pas à participer à des installations vidéos, des biennales, des performances bancales mais aussi dans votre salon pour votre anniversaire. Un duo hyper-actif dont la dernière trouvaille est d'avoir invité Penny Rimbaud (fondateur du groupe punk-anar Crass ya deux siècles et demi) comme producteur et surtout lui avoir laissé de la place sur leur album Tut Tut, Now shake your butt (Truth Cult / Southern 2009) pour deux morceaux-poèmes de dix minutes chacun ! Je ne doute pas que Monsieur a des choses très intéressantes à dire mais j'entrave rien. Et quand bien même si je maîtrisais la langue de Shakespeare sur le bout de la langue, j'aurais franchement pas envie de me taper des poèmes de trois plombes d'un vieux punk à la diction théâtrale. Paye ta dynamique d'album. Surtout quand ce qui encadre ce qui pourrait passer pour l'élément phare du disque sont des titres de pop-punk-surf-lo-fi anecdotiques dont la principale motivation est le fun et vous faire danser. Et j'ai pas une tête à rigoler et encore moins à danser.

Partant de ce constat, Agaskodo Teliverek (qui signifierait Elevage d'étalons en hongrois) ne devrait pas plus me dérider les fesses. Mais de fun et de dansant, on passe subtilement à absurde et psychotique. Du coup la saveur est tout autre et leur premier album répondant au pittoresque nom de Psycho Goulash (Mindfinger records 2008) ne peut qu'en être rempli. Une grosse louchée. Tellement grosse que ça fait un paquet de temps que cet album à la pochette peu engageante traîne sous le coude. Trop d'absurde tue l'absurde et la tête ne retrouve plus sa queue. Dans ce groupe frappé par la malédiction de la chanteuse japonaise prise en sandwich entre trois mâles visages pâles (ça va devenir un concept), c'est fête foraine et ball-trap. Ca tire à vue sur le stand d'un Deerhoof ludique et punky sans que la chanteuse nous punisse du syndrome du chant aigue de vierge effarouchée typiquement asiatique avant d'attaquer le manège de l'Est, ces rythmes de polka frénétique et ces guitares qui valsent que l'on doit au hongrois de la bande (d'où le patronyme je présume). Un grand tour par le grand huit de Experimental Dental School, des jeux vidéos qui s'invitent au bal, des passages à la buvette parce qu'il faut bien souffler et une qualité fluctuante des quatorze attractions en piste. Mais dans la catégorie des groupes à japonaise qui se prennent pour des lapins Duralex sodomites où ça devient un peu trop systématiquement le même délire, Agaskodo Teliverek offre de nouveaux horizons et même si il reste du boulot, on guettera leur nouvel EP qui ne va pas tarder à débouler.

Pour la version mexicaine du lapin Duralex, il faut sonner chez Maniqui Lazer. Oui, le Mexique est aussi à l'honneur. N'importe qui a le droit de faire de la merde. Celle-ci porte le nom de I Learn everything on TV, c'est sorti en 2006 chez Soundsister records. Et le pire, c'est que cet étron, je l'aime bien. Le disco-punk avec plein de synthés bourrés d'électronique et un chicano hurleur. 16 titres en 23 minutes, moins de temps qu'il faut pour franchir la frontière et voir si un label comme 31G à San Diego veut bien de notre attirail de punks clandestins. Dans tes rêves. Tu peux donc continuer à te la péter en toute impunité à l'ombre de ton sombrero, à gueuler des titres aussi con, aussi bon que Fat girls killing models ou Tom Selleck moustache, de filer la hype et faire plus américain que les américains, c'est ni pire ni mieux qu'un XBXRX sous ecstasy mais juste aussi cocasse qu'un punk à chien rose qui aurait choper la fièvre du samedi soir.

Mais pourquoi aller chercher le bonheur aussi loin alors qu'il est là, à portée de main, dans votre chère Bretagne natale. Il y a quelques jours, ce zine chroniquait pour la première fois un groupe russe. Pas besoin de faire autant de kilomètres pour faire exotique. Suffit de pointer sur Douarnenez parce que c'est pareil, cette ville n'est pas réputée pour être la Mecque du rock'n'roll et ça vous fait le même effet que si on vous envoyait un disque du Kazakhstan. Speedball, ça fait pas très autochtone comme nom mais plutôt punk-rock mélodique américanisé alors au lieu d'attendre de voir débarquer un nouvel arrivage de sardines qui ont depuis longtemps désertées le port, c'est une franche attitude de punks à roulettes qui surfent sur la ria. Des punks qui on mis du hardcore dans leur chouchen avec l'arrivée d'un nouveau chanteur (et ça tombe bien, j'ai jamais entendu l'ancien) et un punk-rock mélodique (que je n'ai jamais entendu non plus) qui se durcit et devient moins basique. Bref, j'en sais fichtrement rien comment c'était au début mais Three seconds (Don't trust the hype, Oni Red chords, Craze records 2009), ce nouvel EP 7 titres, c'est du carré, rugueux, efficace qui me laisse aussi froid qu'une sardine en boite (même de Douarnenez) et que je n'écouterais jamais plus.

Encore plus près, carrément à domicile, à Rennes/Roazhon, vous avez Régis Boulard et son accordéon… non… son Chien Vert pour l'album Les Touristes (í éditions ! 2008). Et on va arrêter là de vous balader aux quatre coins du monde parce que ce disque, il aime pas les touristes (pourtant, la musique en compte beaucoup !!). D'ailleurs, on est tous des touristes qu'il dit Boulard, dans le texte à l'intérieur, et même qu'il est marrant son texte, enfin bien vu je veux dire. Je ne comprends pas tout mais c'est le sentiment qu'il fait passer qui compte, ce malaise sur lequel il pointe, qui nous titille tous les jours mais bon, on n'a pas que ça à foutre alors on passe à autre chose. Voilà, c'est comme sa musique avec Fromentin à la guitare et Méheust pour les trucs à claviers + la basse (Boulard lui, c'est la batterie). Cette indicible impression d'angoisse, tantôt teintée d'énervement, tantôt faussement apaisé, quelquechose de rampant et sournois qu'on ferait mieux de ne pas cantonner au jazz pour le seul prétexte que Boulard a traîné avec Paboeuf et Akchoté. C'est avant tout une histoire d'ambiance, de non-dit et de suggestion. Des bruits de rien du tout, des grincements, des agacements, des crépitations, évoquant autant un Brise-Glace qu'un vieux bluesman fatigué voir un Zëro sur le morceau Sur l'échine. Rien de tape à l'œil, pas de monuments majestueux à visiter. Les Chiens Verts préfèrent les ruelles discrètes, la sieste qui nous pend au nez régulièrement à l'ombre d'une bâtisse décrépie, un parfum qui flotte dans l'air et l'air de rien, on suit comme un somnambule. Et si ya bien un voyage qu'ils proposent, il est à l'intérieur et comme ça c'est pas plus mal, ils emmerdent personne.

Je le sentais pourtant bien ce disque. Un beau digipack cartonné épais, rouge, sobre, sur un label basque (Bidehuts records) qui avait déjà fourni du Lisabö, ça sentait la bonne surprise. Hélas, le deuxième album de Willis Drummond est un pétard mouillé, un comble pour un groupe basque. Quelque part - mais c'est flou - entre AC/DC pour le moins pire et le rock pour lecteurs assidus d'Abus Dangereux courant historique pour le moins pire aussi. On retrouve dans ce groupe le batteur de Monarch et feu-Rainbow of Death mais n'allez chercher aucunes connections. Ici c'est punk-rock mélodique et rock'n'roll old-school. J'ai rien contre les trucs à l'ancienne mais de marbre je suis resté.

Pour rentabiliser au mieux son envoi, le label finlandais Sideeffect avait cru bon glisser le cd de Phenomenal Creature avec celui de Baxter's Stockman. Peine perdue. Tout juste peut-on souligner la grande diversité de ce label… Le violon est de sortie, la guitare acoustique itou et sur les grandes étendues glacées de Finlande, glisse un folk-rock d'une puissance rare. J'en veux déjà pas quand ça vient d'Amérique alors en importer de Finlande…

Toujours au nord mais un peu plus au sud, les Danois de Late Night Venture ont tout du
nom qui fait rêver. Prépare toi à décoller mon gars. Quatre titres regroupés sous le titre de Illuminations (Quatermain records 2009), on touche au but, produit par Magnus Lindberg, un membre de Cult of Luna. Rien à voir sinon que ce dernier ne se contente pas d'être assommant avec son propre groupe, il disperse, il ventile, généreux dans l'effort, cette fois-ci en mode indie-pop romantique et pseudo-lyrique. Hyper produit, précieux, ne fera rêver que ma poubelle qui se délecte en ce moment.

Dans le genre indie-pop-rock pimpant et gentillet, vous avez aussi The Trouble with you (Blue Worm records 2009), le premier album du trio américain Porcupine. Mais eux ont la décence de ne pas se prendre la tête et péter plus haut que leur cul, ce qui donne, outre de faire du bien à ses articulations, un disque joliment fade. Ils ont beau durcir parfois le ton et la rythmique, donner une coloration noisy, c'est terriblement propret. Un disque donc entièrement tourné vers la mélodie (logique implacable pour un disque pop), mais quand elles sont toutes d'une banalité affligeante, sans saveur, exécutées avec un sourire colgate sans même une petite pointe d'acidité, t'as pas l'air con.

Avoir un ex-Don Caballero et Six Horse au générique, ça vous titille forcément le neurone. Pat Morris n'est pas le plus connu des ex-quelquechose mais son jeu de basse sur les deux premiers Don Cab et l'unique album de Six Horse laisse un souvenir tenace et un arrière goût de reviens-y. Hélas pour nous et pour lui, si il n'a pas perdu sa vista, il n'est pas entouré d'un Bill Baxter ou d'un Damon Che (même ivre) et le nom de son nouveau projet The Poison Arrows et leur album First class, and forever (File 13 records 2009) n'aura pas la résonance de ces groupes passés. Rien de désagréable en soi, s'écoute sans sourciller et c'est bien là le problème. Manque de nerf, sans colonne vertébrale, qu'une seule basse n'arrive pas à relever/entailler de ces frêles épaules. Trop de synthés, d'effets de studio, un goût de chimique, des ambiances cotonneuses se perdant dans des méandres inutiles. J'ai beau remettre l'ouvrage sur le métier, le CD finit inlassablement dans le boîtier. Et ne va pas y ressortir de sitôt.

On ne peut nier que Black Cock rock. Non seulement ce nouveau groupe d'Austin le souligne dans l'adresse de leur site mais en plus, vu l'énergie déployée à exécuter leurs onze morceaux, ça serait faire preuve de mauvaise foi que de dire le contraire. Bon, c'est pas la mauvaise foi qui étouffe ici mais ne tentons pas le diable. Mais une fois l'énergie fumante posée sur la table et le coq dépiauté, il ne reste plus grand-chose. On aurait pu utiliser une autre métaphore que le coq pour ce patronyme à double sens, surtout quand il s'agit de la poser sur la table mais restons polis. Va pour la section rythmique - ou plus précisément la batterie toute seule puisque point de basse - solide, carrée. C'est l'habillage autour qui coince. Une guitare qui s'efface trop souvent au détriment de keyboards nombreux, envahissants, omniprésents et des effets pas toujours du meilleur goût, une légère accointance avec Brainiac mais sans la folie meurtrière et puis des voix à l'avant à défaut d'être à l'avenant. Que ce soit celle de Whitney Lee, la chanteuse principale ou celle du guitariste Chico Jones qui évolue quelques octaves à peine en dessous, énervées, évanescentes ou trafiquées, elles pèlent le jonc que je n'ai pas noir. Et puis finalement, ce disque ne rock pas tant que ça. Black Cock nous gratifie de passages qu'ils qualifient eux-mêmes de sci-fi core, le truc censé planer haut dans les airs, te faire découvrir un autre monde merveilleux à l'aide de synthés généreux et qui s'écrase à la fin parce que c'est beaucoup de bruit pour rien. L'album se nomme Robot child with a god complex (Australian Cattle God records 2009), ça ne veut rien dire et cette musique n'est pas loin de signifier la même chose.

Beaucoup plus signifiants, les sept titres de Les Pritz sous le nom de …To The Prior (Salottino Prod 2009 et une ribambelle d'autres labels !). Les Pritz, c'est pas allemand, ni autrichien, encore moins alsacien mais italien. Et bien au sud. La Sicile qui aime les gâteaux sablés, on aura tout vu. En tout cas, dans ce coin de l'Italie, on est friand d'une autre spécialité, le rock-noise quasi-instrumental comme d'autres autochtones (Uzeda, Three Second Kiss, etc…) et ce n'est pas nouveau. Les Spritz ont choisi la version allégée et alerte. Ou ça enchaîne rapidement et sans complications inutiles, évitant toute flatulence de fin de repas et avec une forte allusion à une ligne de basse de Jesus Lizard sur Prader Willie. Et puis vingt minutes, c'est vite passé, c'est l'avantage des amuse-gueules en attendant la prochaine fois un plat de résistance plus conséquent. Bonne mise en bouche.

Où on allait reparler de post-rock et sortir les crans d'arrêt. Mais L'Homme Puma est bien plus félin et ruse pour contourner le problème et les revendications. Pourtant, ils ont tous les poncifs dans le garde-manger. Le tout instrumental, le rock qui tire sur les ambiances, les arpèges à tout va, les montées, les descentes mais ya un je ne sais quoi qui le fait. Des éclats noise, un son enrichi et fouillé, un virulence sous-jacente et une nervosité qui vient contre balancer des passages plus mièvres comme le veux le style et que j'adore et des développements à n'en plus finir alors qu'un bon coup de griffe dans la bande s'imposait. Même les samples, cliché du genre, ne me gêne pas plus que ça. Parce que ça fourmille de bruits non identifiés, de claviers discrets, de pets électroniques qui ne sentent pas, de parties qui s'enchaînent sans forcer, On Remplace les Yeux Cassés (Communication is not word / Things get worse records 2009) le nouvel album du trio parisien arrive à se frayer un chemin dans une jungle pire que celle de Calais et qui ne semble pas prête à être démanteler. Alors quitte à s'en taper encore des kilomètres de post-rock cinématographique, autant que ce soit fait à la sauce Puma.

A Poitiers, pas de Puma mais Epileptic. Un vieil animal plus proche de l'ours, qui hante le décor musical français depuis 10 ans, ne sortant de sa tanière qu'avec parcimonie et toujours sans faire beaucoup de bruit. Une grosse bestiole discrète, à moitié mal léchée qui préfère le travail brut et la tradition que les affres de la mode. Leur monde a toujours été construit sur un punk-pop-rock de facture classique, pour toujours faire plus ou moins le même album. Genre Lungfish des marais poitevins. Le truc pas bandant pour un sou. Avec leur quatrième album A Piece of eternity… (Picore / Théâtre, Rejuvenation records 2008), ça va pas aller en s'arrangeant. Pour capter l'attention, leur secret résidait dans la composition, l'art de torcher une bonne petite mélodie de derrière les fagots et, sans artifice, vous emmener en ballade, tranquille, à la fraîche. Sauf que cette fois-ci, l'inspiration est en berne et qu'à force de vouloir épurer les morceaux pour aller à l'essentiel, on se retrouve à gueuler dans le vide. Et Sam Balin le chanteur sait très bien faire ça. Une voix encore plus présente et mise en avant me semble-t-il et forcée aussi qui oublie de faire passer le frisson. Autant sur les précédents albums, j'arrivais à trouver mon compte, autant là, c'est le désert, plat, aucunes accroches valables, voir des morceaux très limites. On a le droit de ne pas être inspiré, avoir des jours sans alors on va laisser passer et on attendra qu'ils retrouvent la flamme. Ou pas.

L'exemple type d'envoi promo qui ne te donne pas envie. A tel point que je viens juste de m'apercevoir, quelques minutes avant de taper ces lignes, que dans la pochette plastiques avec le cdr du split Taciturn / Anemone, un autre cdr s'y était glissé, celui de l'album, le deuxième, de The Third Memory. Et ça fait bien six mois que ça traîne dans la poussière. Si Anemone est taciturne, c'est surtout parce que ce sont deux groupes. Dans la vraie vie, ils sont juste pénibles. Je crois bien que dans une autre vie, j'ai aimé le screamo-hardcore mais pas le boutonneux. Le brutal, celui pour homme, qui puisait ces racines dans le punk plutôt que le pré-pubère, Baudelaire qui pleure sa mère et que la vie, tu vois, elle est trop pinjuste. Tous les poncifs/codes du genre sont là mais c'est léger, tellement léger, sans consistance, sans force qu'on n'arrive pas à croire à une demi-seconde de la folle intensité qu'ils voudraient communiquer. Alors qu'ils soient français (Taciturn) ou suédois (Anemone), c'est le même combat (on va s'épargner le jeu des sept différences). Jusque dans la mort puisque qu'on apprend avec soulagement que ces deux groupes sont désormais fucking dead.
Il y avait donc du Third Memory caché entre deux photocopies couleurs. Un deuxième album s/t sur trois tonnes de labels (Désormais records par exemple où vous pourrez le télécharger en toute légalité, quelle veine !) et où on pourrait reprendre les termes à l'identique figurant dans le paragraphe juste au-dessus. Ou alors dans une précédente humeur massacrante, des abonnés de la rubrique. Screamo-hardcore donc, moins ridicule que bien d'autres, c'est même sûrement de la haute volée pour les fans du genre mais ce dernier s'est tellement enlisé et bouffé la queue depuis des années qu'ils n'arrivent plus à me ressortir le moindre sentiment. Soyons honnêtes, ce n'est pas le seul style musical bien particulier à tourner en rond mais là, c'est le degré zéro de l'évolution. Pire, la sensation d'un plaisir évident à se vautrer dans la nostalgie et copier point par point les aînés.

Le fait que Reuno, le chanteur de Lofofora, soit derrière le micro de Mudweiser n'a rien à voir avec le fait de ne pas aimer ce disque. Tout le monde a droit à une seconde chance. Mais un album qui se nomme Holy Shit (Head records 2009), c'est tendre des perches. Pour ma part, j'aurais enlevé Holy et remplacé par Big, ou Very Big. Non, ce qui m'a fait tout de suite serrer les fesses, c'est le sticker 100% stoner rock en gros sur le plastique promo. Je crois bien que je préfère encore me taper du screamo-hardcore pré-pubère que ces soli ignobles (pléonasme) de guitares hard-rock, cette impression d'écouter ZZ Top déguisés en rockers fangieux plutôt que Lynyrd Skynyrd, des gros bofs de pacotille pastichant une mauvaise série Z (pléonasme aussi ?) portant très mal le chapeau de cowboy et la chemise western (surtout à Montpellier). J'ai sans doute tout faux mais c'est ignoble à entendre. Ou alors j'ai un humour de merde.

Pour finir (ou presque et si vous avez eu le courage d'arriver jusque là), encore une couche de post-rock instrumental, qui tel un serpent de mer, revient vous narguer. Impossible de s'en dépêtrer, c'est irrémédiable, la jeunesse d'aujourd'hui est perdue à jamais, toute une génération de foutue, faudra encore attendre pour la coupe du monde. Sounds of the I sont les gagnants de la dernière heure. Un album self-titled en autoproduction (mais ils cherchent un label) où en fait, c'est certes instrumental mais pas franchement post-machin truc. Un gros mélange de metal, milieu d'où les trois membres semblent puiser leurs racines, tout en sonorités claires, une prétention jazzy et de la complexité comme si ça coulait de source. Comme si il ne pouvait pas en être autrement que de montrer sa maîtrise technique au détriment d'un début de commencement d'émotions dans cette machine bien huilée mais complètement stérile. Une débauche de cheveux longs headbanguant et ne collant pas sur une musique toute proprette et finalement très sage. Mixture idéale pour feu Guitares & Claviers. Et fans de Santana.

Enfin, je ne voudrais pas terminer cette rubrique sans une touche d'optimisme avec Sorry for Yesterday (album Sunshine Connection, Sorry records 2009). A l'est, il n'y a pas que la Triple Alliance, du stupre, du foutre et du mauvais alcool. Il y a fort heureusement pour la jeunesse d'aujourd'hui des exemples, des jeunes gens flashy qui aiment sincèrement les boules à facette, qui (attention) :

distille un rock énergique teinté de touches pop à faire danser les étoiles sur des rythmes endiablés
.

Ai-je besoin d'en rajouter une couche ? Oui, parce que ce groupe distille aussi des riffs puissants et intenses, tellement assourdissants que j'ai failli en rire. Mais ce n'est rien comparé au chant de tapette à mouche. Un pur régal.

Hey Messieurs, Dames, avant de généreusement envoyer vos somptueux disques à ce présent zine, prenez la peine d'en lire quelques pages, histoire de vous épargner des dépenses inutiles et des baffes dans la tronche.
Comme ce Kaophonic Tribu et leur Métamorphose (Kao Prod. / Pias 2009), reçu il y a quelques jours en provenance de la Bourgogne, enregistré par un Fred Norguet qui, comme tout le monde, a besoin de payer ses factures, et où tout est résumé dans le nom du groupe. Comme si on envoyait du grind à Télérama. Franchement, est-ce qu'on a une gueule à chroniquer du djembé en pagaille, de la guimbarde et du didgeridoo…. avec effets (le must) ??!!

Enlarge your music, certes, mais ya des limites quand même.

Voilà pour les revendications de la rentrée. En n'oubliant pas la bonne résolution pour la prochaine humeur massacrante : faire plus court !!!!

Tête de Gondole (16/10/2009)

 

 




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Isis wavering radiant
Heirs s/t
Alkalys choeur delys
Izah finite horizon
When Icarus Falls over the frozen seas
Master Musicians of Bukkake totem...
Sons of Frida the white face of...
Elfin Saddle ringing for the begin again
Clues s/t
Tartufi nests of waves and wire
Japanther tut tut now shake your butt
Agoskodo Teliverek psycho goulash
Maniqui Lazer i learn everything on TV
Speedball three seconds
Chien Vert les touristes
Willis Drummond s/t
Phenomenal Creature s/t
Late Night Venture illuminations
Porcupine the trouble with you
The Poison Arrows first class and...
Black Cock robot child with a god...
Les Pritz ...to the prior
L'Homme Puma on remplace les yeux...
Epileptic a piece of eternity
Taciturn / Anemone split LP
The Third Memory s/t
Mudweiser holy shit
Sounds of the I s/t
Sorry for Yesterday sunshine...
Kaophonic Tribu metamorphose