<13|02|2006> Bec de pelican
Ne cherchez
pas. Théorie de l'entassement et règne animal. Concerto
en ut majeur et tout le tintouin. Mais là, si vous le permettez,
on va passer par la petite porte. Celle de derrière. Je roulerai
sur vous mon plaisir ignoble. Plain
Fade est un cul congelé. La Finlande, le grand nord et
point de marins qui chantent. Leur terre promise est peuplée
de landes désertiques. Anomalie géographique. La latitude
Godspeed You Black Emperor. Là bas, tout en haut, c'est triste
et sans fin. Lies, sanctions and cruise missiles, leur premier
album sur Punos
Sound records jouent du toboggan entre grand calme morbide où
on se les pèle pour rien et montées d'adrénaline.
Pétages de plombs entre gens bien élevés quand
l'ennui devient insupportable. Plain Fade ajoute le chant. Ethéré
le chant. Précieux les guitares comme la musique qui quitte au
fil de l'album le giron de Godspeed pour se diluer dans une mare insipide.
Et alors que certains touchent le fond, d'autres continuent de creuser.
De Nice, je ne connaissais que les Dum Dum Boys. Et j'eus aimé
que cela s'arrêtasse là. A
Red Season Shade n'a rien à voir avec le rock et les
paillettes du glam. Inspiré par Appleseed Cast, j'aurai dû
me méfier de quelque chose. J'ai pas senti le vent venir et le
vent du sud est pervers. La bio parle de post-rock, de maturité,
de rêves et de mélancolie. C'est quoi le contraire ? Mièvre
? Sirupeux ? Tellement post qu'on y voit plus aucune trace de rock.
Gentlemen records,
responsable des sorties de Honey for Petzi, Magicrays et Appleseed Cast
sort ce premier album The Outcome fosters detachment. Cul serré
et variété. Ou variétoche si vous préférez.
C'était juste pour la rime.
Guinea
Pig. Le rock retrouve des couleurs. L'Italie gorgée de
soleil, taillée au chalumeau, l'arrière-boutique pleine
de félicité, généreuse et accueillante.
Guinea Pig, un blaze emprunté par quantités de groupes.
Le cochon de Guinée a la cote. Deux contre un pour se faire exploser
la rate. Coups de butoirs rock'n'roll, peu de calculs et tout dans les
reins,
un fameux coup ce trois mats. Craspec et nerveux, ce rock là
ne se regarde pas le nombril. Des soli tout désordonnés.
Du Old Time Relijun (donc forcément du Captain Beefheart) et
du Spencer qui a du gaz. Des fantômes de blues hantés par
une ferveur populaire qui demandent encore quelques raccords pour être
pleinement opérationnel. Encore un disque plein de promesses
que l'on doit à Psychotica
records.
Model
Down, c'est la classe américaine. Du nickel. Du calibré.
Du rock pour étudiants des campus. L'air décontracté,
le jeune mâle sur de lui, pas prise de tête, à l'aise
dans son t-shirt et ses baskets. Des petits blancs corrects sous tous
rapports qui s'énervent juste un peu façon Yellow Press,
frais et presque dansant à la Q and not U, des refrains agaçants
et que dire de la voix. Un premier EP Voicing the circuit sur
Modern Radio records.
Ils sont presque trop cool. You know what I mean ? Oui, je vois ce qui
te mine mon gars.
Retour en Europe. Leeds où le soleil ne brille
jamais. La grisaille de l'industrie. Retour dans le temps aussi. Let
me Breathe par Bilge Pump sur
Gringo records
date déjà de 2002. Vu que le groupe, excepté quelques
morceaux sur des compilations et singles, n'a rien réalisé
de conséquent, je dis pourquoi pas. De là à dire
que le groupe s'est dissipé pour l'éternité dans
leur grisaille environnante
Trio à l'ironie mordante, Bilge
Pump raffûte dans les angles qu'ils n'aiment pas très carré.
C'est anti-mélodique et fragmenté. C'est bruyant et hirsute.
Ca bobine à la file tout au long de 17 morceaux chaotiques dans
le sens Minutemen ou faiseurs de bruit à la The Ex voir hargneux
à la Swob. Laisser moi respirer supplie le type de la pochette.
Qu'on en finisse avec les convenances. Bilge Pump s'adjuge le droit
du ton et de la forme. Fourmilière en effervescence. Le défaut
de ces qualités. Mais au moins ça tente et ça joue.
Sans arrière-pensée. Ca vaut le coup de se pencher sur
le passé parfois. On y ressasse pas que des conneries.
Frivolvol.
Je ne bégaye pas du clavier. Ce nom rigolo à vous tordre
nous est gratifié par un nouveau groupe finlandais dont la musique
est entièrement mise au service du sauvetage de la planète
et de ses âmes pécheresses. Sur If
Society (label de Echo is your love, Hero is dishonest ou Fun),
Frivolvol signe Frivolous vol 2 : The false security program,
un deuxième album comme son volume l'indique, plein de hargne
et paré pour la bagarre avec les grands de ce monde. Et ils s'y
prennent plutôt bien les bougres. Dans un registre Refused/Lack.
Forcément. Ca calme les ardeurs. Chant/cri screamo hardcore monotone,
quelques clichés bien enfilés contrastant avec des plans
rythmiques ou de guitares tendant bien comme il faut l'élastique
du slip. Au beau milieu de la bataille, un morceau qui dénote.
C=64 relationship. Quand le hardcore se fait inventif. Poudre électronique.
Sortir du rectiligne. Album honnête et sonnant juste. Mais que
Frivolvol devienne frivole et le vocabulaire changera.
Car les clichés, leurs voisins norvégiens de Rifu
n'en manquent pas. Ils les alignent comme si c'était un concours.
Politisé comme une troupe de boy-scouts, Rifu crache en cadence
sur ce bon vieux monde moderne avec la ferveur de soeur Térésa
sur fond de hardcore old et new-school, yen a pour tous les goûts
et les chapelles voir juste du rock, vindicatif et hargneux. Bombs
for food, mines for freedom ! (yen qu'ont peur de rien) est leur
troisième album, sur Go-Kart
records. Je fuis les messes, toutes les messes, quelle que soit
la confession. Les pays nordiques sont décidément très
en verve. Dès qu'il s'agit de hardcore, ça se pointe là.
Au tour du Danemark et Children
of Fall. Là encore, on pouvait craindre les clichés.
Heureusement, les Danois s'en tire avec un sens du hardcore passionné
à la Envy, des compos qui imposent leur lyrisme poignant sans
forcer et un certain sens de l'attaque distinguée à la
400 Years. On craint le pire et on se retrouve avec un troisième
album Bonjour, tristesse en français dans le texte dès
plus plaisant. De plus, Day
After records a sorti le grand jeu. Digipack de luxe. Hardcore de
velours. Carton épais, livret fourni avec les clés du
succès.
Quittons
les chemins balisés pour les ruelles mal éclairées,
les impasses tortueuses et les souricières bienveillantes. PAK
n'est autre que le projet de Ron Anderson, l'ex-Molecules. Le rock dans
tout ces états. Free qu'on dit. Je veux bien et PAK emballe les
mêmes atours. Guitare, basse, batterie, c'est fou ce qu'on peut
faire avec. Un violon, des cuivres filés dans les pattes des
invités et Motel (Ra sounds 2005), deuxième album
du groupe vous invite dans sa chambre qui donne le tournis. Le charme
des musiques de l'Est dans le bouillonnement jazzy new-yorkais. C'est
la fête au village. Hautement rythmique et guitare à foison.
Dommage que la virtuosité prenne le pas sur l'émotion.
On s'y perd dans leur Motel.
Lo-fi manga experimental patapata impro noise. Ce n'est pas un virus
qui vient soudainement d'infecter votre ordinateur mais la formule magique
auto proclamée ironiquement pour entrer dans le monde mystérieux
de IOIOI.
Le groupe d'une seule personne. Une italienne marquée au fer
blanc par le film de Kyoshi Kurosawa Bright Future au point de lui donner
ce nom à son premier album sur Ebria
records (2005). Album ou plutôt assemblage de sons, flux désordonnée
d'idées anarchiques, jeté en vrac sur des bandes magnétiques
avec les moyens du bord. Une bricolo du dimanche qui navigue entre pop
maison et électronique super cheap, avec la volonté de
créer une musique intuitive comme si c'était un bébé
derrière les manettes. C'est touchant mais est-ce une raison
suffisante pour faire un disque bien anecdotique
Dans la série de ces splits albums, les américains de
Cerberus
Shoal pactisent avec The Magic Carpathians. Un étrange
groupe polonais que ces derniers. L'inspiration vient de l'Est et des
montagnes des Carpates pour le chant. Genre mystère des voix
bulgares. Mais là, pour cette collaboration où douze musiciens
s'en mêlent, c'est plutôt Bouddha au pays de l'impro soft.
The Life and Times of the Magic Carpathians and Cerberus Shoal
est le quatrième volet de ces collaborations initiées
par Cerberus Shoal (après Alvarius B, Herman Dune et Guapo).
North East
Indie se cache toujours derrière l'affaire. Quatre très
longs morceaux plus loin, je n'ai plus qu'à passer le balai et
éteindre les lumières. Tout le monde il est parti. J'espère
au moins qu'ils ont pris du plaisir à faire ça. Merci
pour nous.
Je me rappelle d'un disque de Oliver
Twist que le guitariste de Eniac m'avait généreusement
offert. Comme si il voulait s'en débarrasser. Encombrant cadeau
dont je n'ai jamais réussi à aller au bout. Genre plus
mauvais que le pire album de Robocop Kraus. Avec ce quatrième
album Tausend kleine tänze (Rewika
records 2006), ce groupe de Saarbrücken ne change pas grand-chose
à son programme. Dance punk yéyé bien dans l'air
du temps avec de multiples collaborations (cuivres, synthés,
churs, flûte, xylophone) d'où le nom du groupe rebaptisé
en Eine Oliver Twist Kooperation. C'est un poil mieux foutu et convaincant
que les précédents jets mais décidément,
je n'y arrive pas. Tout ça reste bien futile.
Futile
n'est pas le mot qui vient à l'esprit à l'écoute
de Superstatic
Revolution. C'est du lourd et du torturé. Goodbye
Mr Wanton (Basement
Apes Industries 2005) dit au revoir à vos dernières
illusions. Aux confins du metal et d'un hardcore noisy, cette musique
séduira par son efficacité et son savoir-faire mais éprouve
moult difficultés à sortir de l'ornière dans lequel
tant de groupes se fourvoient. Enfin bref, si des Mastodon ou Nostromo
sont votre pain quotidien, cette révolution super statique (tout
un symbole quand on y réfléchit) originaire du sud de
la France ravira votre dose sanguinaire quotidienne.
Il y a des noms qui ne trompent pas. Schwere
Artillerie, restons groupir, est aussi doux à l'oreille
qu'une attaque de Panzer dans les Ardennes. Mais c'est des montagnes
grenobloises et casques de CRS visés sur la tête que descend
ce jeune groupe et son premier album sous le bras répondant au
nom tout aussi avenant de Brutal bepop show (Tears
from silence records 2005). 25 minutes de screamo hardcore chaotique
et hurlé dans les règles de l'art. Totale maîtrise
et totale furie que le violon en morceau caché n'apaisera en
rien. Aux cotés de leurs compagnons d'écurie The Third
Memory, la paire est belle mais vaine. Pour les puristes du genre.
La banane sauvage et les foules apeurées pour un deuxième
album Staring at the surface autoproduit et magnifiquement digipacké
(du verbe digipacker). Bananas
at the audience, ce n'est pas du ska ou du psycho. C'est du
lyonnais qui ne donne pas dans l'habituelle filiation Bästärd/Deity
Guns. Juste un poil de Condense et encore. On cite souvent At The Drive-In
comme influence principale. Fainéantise sans doute, tout ça
n'a rien d'évident. Ces bananes qu'ont peut manger par tous les
bouts carburent juste à l'ardeur communicatif, cette petite graine
de folie qu'on appelle rock'n'roll et qui permet à Bananas at
the audience de tirer vers le haut des compositions qui manquent d'un
je ne sais quoi, d'accroches plus évidentes, d'une personnalité
plus affirmée pour marquer franchement les esprits. Le premier
album m'avait laissé de marbre. Cette fois-ci, ça se réchauffe.
Gageons que le troisième sera le bon à moins d'avoir avant
le déclic sur scène où ces bananes se consomment
apparemment mieux flambées. Ca tombe bien, soirée lyonnaise
le 10 mars prochain avec aussi Kabu Ki Buddah et Doppler à l'Antipode
à Rennes. Sommes-nous en terrain connu ou en terre inconnue ?