<23|12|2005>
Dans
mon petit soulier, je serais dans de beaux draps.
En cette
veillée de Noël, vous êtes en panne d'idées,
vous ne savez pas quoi offrir à votre vieille tante qui pique
? Rien de tel que le bon CD discographique, ce produit miracle de la
consommation moderne vendu à prix cassé, cette bonne overdose
de musique qui regroupe le meilleur du meilleur, les inédits
introuvables qu'on se demande comment on faisait sans et qui vous évite
de débourser des fortunes sur e-bay pour acheter ce qui épatera
les amis. La totale de Sardou ou Starmania étant épuiser,
Tête de Gondole accourt à quelques jours de la ligne d'arrivée
fatidique avec dans sa hotte une ribambelle de cds qui, j'ose l'espérer,
piquera de curiosité tout vos invités. C'est Tati qui
va être contente.
Dans
son soulier, vous déposerez tout d'abord la compilation des singles
de The Ex (Singles.
Period sur Vicious
Circle records 2005). 70 minutes regorgeant de bouts de vinyles
disparus depuis belles lurettes et retraçant la vie trépidante
de nos hollandais préférés entre 1980 et 1990.
Des premiers morceaux suintants bon l'amateurisme, oups pardon, l'esprit
punk par excellence, je sais pas jouer mais moi aussi je peux le faire,
aux morceaux plus élaborés, la qualité chez The
Ex suivant la courbe des années. Des morceaux excellents qui
n'attendaient que ce cd pour renaître de leurs cendres. Forcément,
malgré les notes internes de la pochette, on aura jamais ces
magnifiques objets cartonnés et politisés mais ce cd est
tout simplement indispensable pour tous les The Ex addicts que nous
sommes.
Si
votre vieille tata qui aimait vous fesser recherche un brin d'exotisme,
vous pouvez également glisser la compilation de Melt-Banana
(13 hedgehogs MxBx singles 1994 - 1999, A-Zap
records 2005). Même principe que précédemment. Des
singles introuvables, tirés à trop peu d'exemplaires et
qui retracent toute l'évolution musicale des Japonais. De leur
tout premier 45 tours Hedgehog en 1994 à leur 45 Dead
Spex en 1998, ce sont en tout 56 morceaux étalés sur
13 singles ou split singles, voir un split 10'' avec les Islandais de
Stilluppsteypa que ce CD vous dévoile. Une discographie à
rendre fou n'importe quel record geek puisque depuis 1999, Melt-Banana
en a sorti pratiquement autant. Et on ne compte pas les titres éparpillés
sur des compilations ! Pire que des lapin(e)s, nos Japonais(es) ne peuvent
à chaque fois accoucher de morceaux d'anthologies. Nombres de
ces titres restent assez anecdotiques. Ils profitent de ces formats
courts pour également expérimenter, passant des compos
ultra courtes et ultra classiques à des morceaux bidouillés,
multipliant les collaborations avec les bouseux de Plainfield ou encore
Discordance Axis. Une compilation pour les fans insatiables et à
conseiller aux épileptiques si jamais vous n'aimez pas les épileptiques.
Profitons
d'être aux antipodes pour aller faire un tour en Nouvelle-Zélande.
Un double CD de The Clean qui date déjà de 2003.
Mais avez-vous déjà essayé de traverser les océans
avec des rênes ?! Ce n'est donc seulement maintenant que je découvre
que ce groupe pop atypique a sorti une Anthology sur bien sûr
Flying Nun records. Imaginez
donc ! The Clean existe depuis 1978. Autant dire qu'ils ont de quoi
dire. The Clean, c'est le meilleur de la pop Néo-Zélandaise.
Un croisement parfait entre la nervosité des Feelies et le spleen
des Go-Betweens avec cette classe indéfinissable qu'ont la plupart
des groupes de cette île du bout du monde. On retrouve ici les
légendaires EP Tally Ho, Boodle Boodle Boodle (enregistré
par Chris Knox) et Getting Older, ce dernier marquant la fin
du groupe en 1983
pour mieux le ressusciter. En 1989, un nouvel
EP, un très bon album Vehicle et c'était reparti
pour un tour ! Tous ces disques parfaits ainsi que des inédits
et des raretés se trouvent coincés sur ces cds qui seront
toujours trop petits comme vos souliers pour accueillir ce groupe immense
!
Restons
dans le passé même si leur musique est à peine ridée.
Theoretical Girls a eu une très courte existence, entre
1978 et 1980, la pleine époque du No-Wave, étiquette dont
sont affublés moult groupes new-yorkais actuels (à tort
ou à raison, je vous laisse seul juge), les Liars en tête.
Des membres dont les noms à l'époque ne disaient rien
qui vaille mais qui ont fait leur chemin par la suite, notamment celui
de Glen Branca (guitare) et Wharton Tiers (batterie). Avec Jeffrey Lohn
(chant) et Margaret DeWys (synthé / chant), ils sont un témoignage
bigrement très intéressant de l'agitation punk qui sévissait
à NY fin 70's aux cotés de DNA, James Chance and The Contorsions
et Teenage Jesus and The Jerks. Mais la pauvreté de leur discographie
(un seul 45 tours !) n'a pas permis à ce groupe la reconnaissance
qui lui échouait légitimement, notamment pour avoir influencé
un groupe noise majeur des années 80 : Sonic Youth. A l'écoute
de certains titres, on comprends mieux d'où débarquaient
la bande de Kim Gordon qui du coup font moins office d'OVNI. Après
de multiples recherches, Acute
records a réussi a dégoté des enregistrements
cassettes, des pirates live et sort la totale avec l'unique 45 tours
en 2002. Je sais, ça date mais j'aime bien avoir un train de
retard vu que je viens de découvrir ce groupe en 2005 ! La qualité
de certains de ces enregistrements est à la hauteur des fonds
de tiroirs qu'il a fallu fouiller pour dépoussiérer ces
compositions mais l'ensemble se tient parfaitement, photographie instantanée
d'une époque musicale où tout était à (re)créer,
spontanée, immature et en perpétuelle recherche, bref
du punk et du bon.
Back
to le présent avec New
Brutalism. Si vous avez une botte toute crottée derrière
le sapin, glisser y ce disque posthume. Les indécrottables New
Brutalism ne sont pas la pâle copie de Shellac comme on veut trop
souvent les réduire mais l'influence est là, certes. Du
coup, c'est le vilain petit canard, le truc qu'on cache au repas de
famille. Sur cette compilation nommée 2001-2003 et sorti
par Lujo records
en 2005, on retrouve le single sur Hand Held Heart records, l'album
A record of american fury sur Code of Ethics et le seul disque
que je n'avais jamais eu l'occasion d'écouter venant de leur
part, le EP quatre titres Turbo Jet. Appelé ainsi car
le groupe voulait que ce soit leur disque le plus rapide et tranchant.
Du coup, ya comme un p'tit air de AC/DC qui s'invite à table
avec toujours Shellac dessous la nappe à faire des saloperies.
Du bien brutal et cadencé qui n'enlève en rien la sale
haleine que ce groupe possède pour la vie. Mais ma vieille tante,
l'haleine fétide, elle aime. Et j'aime ma tante.
A
l'heure du grand décompte final, quand Noé rameutera toutes
ses brebis sur son arche, Cream
Abdul Babar fera parti des oubliés. De la race des seigneurs
sanglants, genre, au hasard, Unsane, ces New-Yorkais avait une personnalité
forte et ultime et plus d'une corde à leur arc. Aux confins du
hardcore le plus torturé et du bruit le plus dur avec un petit
air de trompette, CAB était un must de sauvagerie fine ! Ce double
CD (Excavation : 1995 - 1998 sur Guilt
records 2005) se propose de faire un retour sur le début
de leur carrière avec leur 1er album The Backwater Of Masculine
Ethics un plus tantinet punk-rock que la suite ainsi que le 45 Buried
In Broken Glass et le split avec I Guard The Sheep (et moi
mes chiens) plus un cadeau bonus sous forme de remix. Mais le meilleur
album reste quand même le deuxième album The Catalyst
To Ruins sorti en 2001 sur At A Loss records. Paix à leur
âme.
Si
vos moyens financiers approchent du néant, tentez votre chance
avec la compilation à bas prix de Gold
Standard Laboratories : Golden Grouper volume 1 sorti
en 2004. Que des inédits de groupes en devenir et qui ne demandent
qu'à s'inviter à votre table. La crème de la
crème californienne dixit GSL, dans le triangle Los Angeles,
San Francisco, San Diego où viennent se perdre avec délectation
Die Princess Die, 400 Blows, Wives, Dmonstrations, Swann Danger pour
les groupes qui me sont connus et qui offrent d'excellents morceaux.
Pour les révélations et les groupes à suivre, citons
New Collapse et son hystérie collective, Gasoline Please, jeunes
morveux bruyants mais présentables tout comme 24k Gold. Même
la new new wave n'est plus si nouvelle que ça à force
mais ces jeunes groupes comme Tender Button, The Boy Explodes, The Weegs
ou Black Ice (à ne pas confondre avec Black Dice) mélange
habilement le passé avec le présent. Une compilation de
qualité qui ne se contente pas de nous fourguer du vieux pour
du neuf. Des inédits de qualité et des tas de découvertes
pour frimer au pied du sapin.
Si
vous désirez vous fâcher définitivement avec votre
famille, offrez leur du Racebannon.
Surtout quand la durée d'un Racebannon s'étire sur deux
long CDS ! S'écouter leur noise-rock mi-hystérique mi-psychédélique
et ne rien dire sans broncher n'est pas de nature humaine. The Inevitable
Singles And Rarities 1997-2005 sur Alone
records est un golghota difficilement franchissable. Durant ces
neuf années, Racebannon a dissémimé aux quatre
coins du globe des tonnes de 45 ou split singles. Des champions du monde
hors catégorie. Ajouter deux inédits, quatre versions
démos, secouez bien mais pas trop et vous avez la dose qui calme.
Sans oublier des reprises à l'origine sur des albums tribute
comme Death Valley 69 de Sonic Youth, Sabbath Bloody Sabbath
de Black Sabbath et un tribute à Captain Beefheart dont ils sont
les dignes fils en version noise et vous comprendrez ce que douleur
signifie. 105 minutes de pur bonheur avec des vrais morceaux d'anthologie
dedans. Offrez les frapper.
Pour
la bûche, on va quand même garder du lourd. Un hommage aux
Melvins sous le nom de We Reach : The Music of The Melvins
sur Fractured
Transmitter records 2005. Et pour tenir la comparaison, il fallait
des groupes à la mesure de leur démesure. Dillinger Escape
Plan, Isis avec Agoraphobic Nosebleed (le duo tendre), Mastodon, Pig
Destroyer, Eyehategod, High on Fire et Keelhaul. La liste est longue.
18 groupes qui bavent et qui éructent dans le sillage des maîtres.
Mare (groupe d'Hydrahead) commence à contre-pied pourtant avec
une reprise tout en douceur de Nightgoat. Ça sera le seul
moment d'accalmie
. avec le morceau de clôture, une version
rap et rigolote (oui les deux sont possible) de Prince 2. Entre les
deux, du lourdingue qui fait fuir ou comment faire passer les Melvins
pour un vulgaire groupe de tâcherons de hard-rock. Ou du sublime
avec la collaboration Isis/Agoraphobic Nosebleed, plus lourd et suintant
que l'original. Pour les autres, je vous conseille les originaux car
l'ensemble est bien laborieux. Il faut s'appeler les Melvins pour sonner
aussi puissant et lourd sans la graisse sur les cotés. Bûche
de plomb et joyeux noël en perspective.