banqueallemande
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Banque Allemande
Willst Du Chinese Sein Musst Du Die Ekligen Sachen Essen - LP
S-S records 2013

Si Eins, Zwei, le précédent album, était une compilation de deux disques sortis très confidentiellement en 2006 et 2008, le trio berlinois tente cette fois-ci de décrocher la cagnotte avec que de la nouveauté. Et il va falloir de la persévérance pour monter à l'assaut de la Banque Allemande. Alors que son prédécesseur ne comptait que deux titres à rallonge encadrant huit courtes salves, ce nouvel album - dont je n'essaierai pas de taper une deuxième fois le titre et qui vous dit en gros de faire attention à la bouffe chinoise - présente des morceaux de marathoniens. Quatre des six titres vont chercher entre les sept et neuf minutes, un riffage intensif d'une guitare ferraillant dur sur des rails rouges de bouillonnement, une rythmique droite dans ses bottes qui tape, qui tape et qui tape encore, un amour de la répétition à outrance, des plans qui s'empilent pour former un mur d'acharnement, Banque Allemande en met plein le buffet. Et la voix monocorde, même soutenue parfois par des chœurs maladroitement harmonieux et un chant en allemand n'ajoutent pas à la frivolité de l'ensemble.
J'avoue que les premières écoutes ressemblaient au bruit d'un concasseur qui les brisait menu menu sur fond d'ennui généralisé. Et alors qu'on se croyait reparti pour une copie conforme du précédent en version péplum, le trio a, comme par miracle, réussi à inverser la tendance. A force d'un bourrage de crâne jouant sur de subtiles variations. A force de tentatives, même mineures, de petites mélodies respiratoires, d'ondulations tentant de briser le carcan. Avec des compos plus travaillées qu'elles en avaient l'air, d'une batterie pas si binaire que ça, de plans de basse sortant du lot, d'une guitare pouvant virer fiévreuse et d'un enregistrement au grain épais, granuleux auquel il fait bon se raccrocher. Une sculpture plus avenante se dégage de la matière brute.
Alors certes, Banque Allemande n'a pas le talent mélodique des Gordons ou Bailterspace et cette profondeur de champ qui va avec. Le rouleau-compresseur aurait parfois tendance à tourner à plat mais en rallongeant quasi constamment le tir, Banque Allemande transforme sa machine à avancer coûte que coûte en machine guerrière. La répétition, nerf de leur bataille, se met au service de l'intensité et Banque Allemande fini par nous convaincre, nous faire entrer dans sa sarabande infernale. La roue de la fortune tourne enfin. Le pactole n'est pas énorme mais on peut commencer à capitaliser sur Banque Allemande.

SKX (16/05/2013)