<25|08|2012> Triste
sire
Un concerné
n'étant pas qu'un imbécile encerclé (merci Pierrot),
il faut se remettre dans le bain et sérieusement considéré
- qui n'est pas forcément un abruti s'étonnant de tout -
la pile de disques flasque et morne n'ayant pas bougé d'un pouce
depuis des mois, sauf dans le sens vertical, à force d'empilement
de médiocrité et de lassitude crasse. Avec des Syriens qui
explosent des records olympiques de vitesse sous les balles de l'affairisme,
Phil Collins qui n'est toujours pas mort et le dur chemin de la rentrée,
comment ne pas être d'une humeur massacrante.
Qui
n'a jamais ressemblé à un gland avec des espadrilles ?
C'est la honte ce truc, c'est moche et en plus ça daube alors
quand une misérable pochette cousue main dans ce tissu honni
avec un nom qui fait fourcher la langue - Espardillos
- débarque à la maison, ça ne peut partir du bon
pied. Coup de pompes qu'il s'appelle ce CD 100% auto-produit
de la part d'un duo basse-batterie originaire d'un peu partout de la
France mais semblant avoir fini par posé ses valises à
Paris. Un duo qui a le coup de pompes rugueux, proche d'un vieux Sabot
tchèque et à vrai dire, elle aurait tout pour me plaire
cette paire. La basse envoie le gros grain, les cassures ne se départissent
jamais d'un bon vieux groove montrant le chemin. Pas d'extrapolations
inutiles, ça reste détendu de l'orteil tout en marquant
son territoire d'une saturation et d'une rudesse ensoleillée.
Mais c'est comme à la plage. Je m'emmerde assez rapidement. C'est
bien joli tout ça mais c'est quand même bien plat. Convenu
et sans la petite vague de folie qui nous sortirait de notre torpeur
de vieux loup de mer. Il a beau recevoir, un peu partout dans les zines,
des lauriers dont on ne tisse pas les espadrilles, j'attends toujours
qu'Espardillos me mette un coup de pied au cul. Ca viendra peut-être
en concert, un jour
Par
contre, un groupe qui ne me mettra jamais un coup de pied dans le fondement,
c'est Mastervoice.
Question de style. Le duo de Périgueux a beau être un duo
batterie-basse, leur style n'est pas le noise-rock hystérique
qui en fout partout mais fait irrémédiablement penser
a un bon groupe de hardcore mélodique. C'est dégueulasse.
Six nouveaux titres sous le nom de Instrument-Transition (Some
Produkt, Kicking
et Smalltones
records 2012) faisant suite à Avalanche,
premier album qui n'avait déjà pas provoqué une
cascade d'euphorie. Mastervoice a en plus mis une bonne couche de vernis
en allant enregistrer au Black Box avec Peter Deimel. C'est donc encore
plus ample, plus nickel, plus rien ne dépasse. Après,
si on arrive à dépasser le double chant mis en avant et
aux mélodies de taulières de resto routiers, on peut déceler
un brin de tension et de noirceur, quelques parties intéressantes
comme sur Ink Blood ou le très apaisé Instrument
qui a la très bonne idée de réduire les voix au
silence. Pour le reste, Mastervoice aboie, la caravane passe.
C'est
la première fois que j'ai du débourser de l'argent pour
retirer un disque chez notre charmante Poste nationale, un expéditeur
indélicat et anonyme n'ayant pas assez affranchi son courrier.
Les temps sont durs. Quand j'ai vu que c'était un disque de Crash
Taste, j'ai tout de suite regretté mes 1€80. Les
temps sont durs. Pour tout le monde. J'avais le souvenir (assez vague
il est vrai) d'un groupe de punk-rock mélodique en provenance
de Poitiers. Pour Poitiers, la mémoire est bonne. Pour punk-rock
mélodique, beaucoup moins. Ou alors si mais pas façon
(feu) Seven Hate à roulettes dont un membre sévit dans
Crash Taste mais lorgnant plus vers Washington DC, l'écurie Dischord
ou Jawbox, avec un minimum d'angulosité et ne donnant pas envie
de sauter immédiatement sur un skate pour emmerder le brave passant.
Le Tigre à 5 Pattes (Sicksack records 2012) est leur nouvel
album après un paquet d'années de silence et s'avère
franchement moins pénible que l'instant où l'enveloppe
s'est déchirée pour laisser apparaître ce putain
de digipack avec un artwork signé Tanxxx. Après, ça
reste encore une histoire de style mais Le Tigre à 5 Pattes
comporte suffisamment de mélodies accrocheuses et bancales, de
petits défauts qui en font tout le sel, d'honnêteté
et d'aspérités pour ne pas (trop) regretter ces 1€80.
Le
langage de [P.U.T]
me parle déjà plus. Un vieux langage de metal, de punk,
d'indus, de noise, de machines et de bruits rampants luttant contre
l'épaisseur des guitares/basse, d'une boite à rythme comme
on n'en fait plus contre des voix belliqueuses, voir d'outre-tombe (hélas),
une vie comme des bêtes après la bombe, la grosse, et un
sac d'os qu'on a connu plus en forme. Like Animals (Pogo,
Dismember records 2012), c'est le retour dans les années 90,
cinquième album d'un duo de frangins écartelé entre
Paris et Bruxelles, toujours dans la zone d'ombre et continuant vaille
que vaille à poursuivre cet idéal de sonorités
qu'ils ont dans la tête depuis des lustres. Ils n'en démordent
pas, ça un gout d'anciens dans la bouche, de Godflesh, de Pore,
de Hint, de Kill The Thrill ou de Binaire en mode metal. Un gout de
répétitions, lacérations, sirènes dans le
lointain, d'usines, de centrales nucléaires. C'est tellement
ancré dans le noir et le sordide que ça ne décolle
jamais. Malgré les sons qui me plaisent, les compos de [P.U.T]
ont toujours été trop académiques, trop convenus,
la boite à rythme est tristement programmée et Like
Animals, comme leurs précédents disques, a un gout
d'inachevé et de gâchis. Finalement, le langage de [P.U.T]
ne me parle pas (plus) trop.
Restons
dans le monde de la poésie avec Urine
et leur album I Love Pipi. Au moins, ça le mérite
de parler à tout le monde, esprit scatologique ou pas. Urine,
ça ressemble à une cours de récré, un défouloir
voir une pissotière pour trois membres du beaucoup plus sérieux
Lab°
dont un membre (Dylan Bendall) sévissait aussi dans Schoolbusdriver
(quoiqu'il faille (faillu) utiliser à nouveau le présent
puisque Schoolbusdriver vient d'annoncer sa reformation). Cependant,
I Love Pipi n'est pas un disque merdique comme on aurait pu le
croire. Certes, pas de quoi pisser dans un violon mais ça a le
charme d'un sympathique concours entre potes avinés à
qui pissera le plus loin (ménage ses chaussures). Ça pisse
en cadence (21 morceaux en 24 minutes) des ritournelles punks dont le
timbre de voix de Bendall rappelle encore et toujours celui de Jello
Biafra. Ca se pisse en sifflotant avec moultes bourrades dans les cotes,
ça se pogote gentiment, ça arrose les plates-bandes des
Clash (Leisure Time), des Pogues (What a lovely teapot),
ça se pisse aussi parfois dessus, du punk 77 en mode alternatif
franchouillard 80's évité d'extrême justesse, je
passe mon tour. Plus généralement, Urine pisse à
la raie de tous les pisse-froid.
Continuons
sur le registre humour & chanson avec le gai-luron de la chanson
française, Séb Radix, animateur social chez Kabu Ki Buddah,
despote éclairé du zine Joie
de Vivre et Nouille en Salade et du conglomérat Rock'n'Roll
Masturbation, label qui vient de sortir avec les multinationales
de l'artichaut, Pure
Pain Sugar et Echo
Canyon records, son projet solo sous le nom lamentable de Seb
& The Rhââ Dicks, cette famille de brassicacées
(bras cassés ?) étant composée de Pedro de la Hoya
à la batterie et Nod
Off à la guitare. Bon, je crois que j'ai tout dit parce que
pour le reste, Séb Radix le dit mieux que quiconque (donkey)
avec des sous-titres explicatifs en-dessous de chaque titre sur ce 45
tours tournant en 33. "Rock engagé" pour Do you
(really) want to live in Switzerland ?, du "punk-rock"
(pas de base) pour Johnny Weissmuller, du "rock" (pas
de base) pour 35, de la "pop rythmée" (de crooner)
pour Zob Scene et une "ballade rock FM" pour You're
my Milf qui n'a rien de bandante. Bref, la déconnade et le
huitième degré sont une seconde nature pour Séb
Radix mais ça me donne autant envie que le gâteau bleu
saupoudré de mégots de cigarettes posant pour la pochette.
Autre
troubadour à l'humeur désinvolte, Les
Pelvis Enragés. Il
était ma sur possédait ce trouble indicible
et une sexualité incertaine. Artaud a Tort, leur nouvelle
production, ne réitère pas ce trouble et c'est la folie
qui est incertaine. On retrouve ce chant, cette logorrhée verbale
incompréhensible bien que chaque mot soit distinctivement audible.
La forte présente des synthés est toujours d'actualité
pendant que le couple guitare, batterie fait ce qu'il peut pour participer
au débat, c'est-à-dire pas grand-chose sauf pour tartiner
des plans prog-rock comme sur le début de Mona Lisa. La
seule nouveauté, c'est un accordéon sur deux titres (yen
a quatre en tout) mais son apport n'a rien de prépondérant.
Bref, ça suinte pas le bonheur et si c'est la folie qui était
visée, elle est laborieuse et se perd dans les méandres
de compositions sans issue.
Je
ne doute pas un seul instant que la démarche de Chocolate
Pain est d'une sincérité à toutes épreuves,
de leur investissement sans faille, tout comme celui du Conseil Général
de l'Isère et, en gros, de toute la région Rhône-Alpes
qui semble s'être donné rendez-vous sur le projet de ce
trio grenoblois, de leur ambition à créer un disque original,
à la puissance évocatrice inégalée, un projet
dans lequel le trio croit dur comme fer, pour preuve les nombreuses
relances par mail du groupe pour savoir quand ce modeste zine va chroniquer
leur uvre. Mais comment leur dire, sans vouloir vexer personne
tout en restant poli, que leur album Bliss est mortellement chiant
? Un opéra-rock de soixante-dix minutes, que dis-je ou plutôt,
c'est eux qui le disent, un conte, un album concept qui retrace l'histoire
de deux âmes perdues à la recherche d'un bonheur fantasmé
et intouchable, de ceux qui essaient de les retenir, de ceux qu'ils
entraînent dans leur folie
J'ai fait quoi pour mériter
ça ? Le chant est atroce, qu'importe le ton qu'il emploie, c'est
maniéré, prétentieux et là je ne parle pas
que du chant mais de l'ensemble des 21 compositions dont pas mal d'interludes
censés raconter une histoire. La variété des ambiances
est une tromperie et je ne pensais pas que ce soit encore possible qu'un
groupe de personnes qui ont l'air pourtant jeune et bien portant puisse
pondre encore de nos jours un truc aussi lénifiant. Misère
en Isère.
Maintenant
qu'on est lancé, on ne va pas s'arrêter en si bon chemin.
Franchissons allègrement l'Atlantique pour aller à Portland,
chez Why I
Must Be Careful, le genre de truc qui ne me vient jamais à
l'esprit, surtout quand on me sert de l'expérimental-jazz-prog-rock
de mes couilles. Faisons n'importe quoi, y'aura bien quelqu'un qui trouvera
ça intéressant, dans le doute. Leur album se nomme Honeycomb,
c'est de l'auto-production (encore heureux qu'aucun label n'ait voulu
sortir ça) avec deux titres de 17 et 19 minutes. Je me demande
encore comment ce disque a pu atterrir ici ?! Le seul intérêt
aurait résidé dans l'emballage. Une sortie vinyle limitée
à 100 exemplaires dans un truc en bois ressemblant aux alvéoles
dans les ruches, un objet de malade qu'ils ont eu la lucidité
de garder pour la vente uniquement (si jamais ils en vendent un jour),
se contentant d'un modeste CDr et d'une pâle photocopie pour la
promo. Je ne peux leur en vouloir.
Mais
ya mieux. Eric Baylies, principal instigateur de Baylies
Band déclare que ce groupe a commencé il ya dix-sept
ans à la suite d'une prise d'acide, d'un peu de fumette et d'un
rêve. L'acide et la weed sont partis depuis longtemps mais le
rêve est resté. J'aurais tendance à croire qu'il
reste encore de bonnes traces de substances interdites chez ce brave
Eric. Leur nouvel album se nomme All Clowns No Lions (75
or Less records 2012) et se contente d'être une seule longue
tirade de 53 minutes. C'est étrange, j'ai toujours imaginé
que c'était typiquement le genre de musique que des personnes
jamais descendus de leur trip seraient capables de produire. Sur ce
point là, Baylies Band ne nous déçoit pas mais
c'est pas donné à tout le monde de faire du kraut-rock
de qualité supérieure.
Détendons
nous un brin avec Harold
Martinez. Un type originaire de Nîmes, ex-bassiste de
Clan Edison (jamais entendu parler) et dont le premier album, Birdmum
(Socadisc 2012)
se chauffe au bois d'un rock funeste et tourmenté sorti de la
hotte du prêcheur David Eugene Edwards et son 16 Horsepower ou
Woven Hand dans une version minimaliste. Le Martinez semble jouer de
tous les instruments et surtout d'un banjo et d'une guitare, accompagné
par une batterie, soutenu par des churs et d'autres sonorités
qu'on jurerait tirer d'une basse ou de claviers. Il a beau étiqueté
son projet de folk, c'est tout de même du folk amélioré,
du folk incantatoire, bordurant dans la country avec ce maudit banjo
et exhalant une odeur de blues gémissant en invoquant le pardon
des Cieux. Même dans le Gard, on connaît le swamp et celui
de Harold Martinez cogne sous le caillou, des ambiances à faire
fendre la pierre et les curs. Alors, il est où le problème
? Bin yen a pas, faut pas voir le mal partout, c'est juste que je ne
tiens pas la distance. Neuf titres un peu trop redondant, avec des mélodies
vocales (plaintives et légèrement chevrotantes) semblant
se répéter à l'identique d'un morceau à
l'autre, finissant par lasser un brin et une atmosphère générale
larmoyante qui pèse sur le ciboulot. Mais ça n'enlève
pas un sentiment diffus de plaisir et d'ensorcèlement suintant
de certains morceaux sobrement sombres et touchants, ce qui fait qu'on
surveillera attentivement la suite du Martinez.
Apostrophe
interpelle. Ce n'est pas encore le pivot de la scène berlinoise
mais le trio n'est pas loin de convaincre. Un hardcore hybride tirant
autant vers le post-punk que le noise-rock allégé, voir
un punk-rock à la Leatherface, somme de rencontres de trois personnalités,
dans le carrefour cosmopolite de la capitale allemande, avec un anglais,
un français et un allemand (quand même), chacun essayant
de faire entendre sa voix. Et le chant, c'est souvent le problème.
Les voix, souvent à deux, sont en avant, très en avant,
comme des rugbymen qui vont s'en ramasser une à force de charger
dans le tas comme ça et beugler comme des ânes parce que
la musique a bien plus à donner. Un bon exemple, Music Box,
instrumental de haute volée, alerte, percutant, fin alliage de
noise et de math-rock coulant. Et les huit titres de ce premier album
auto-titré (Chanmax
records 2011) ont tous quelquechose à offrir. Et à souffrir
aussi. Des accroches qui n'accouchent pas sur du fantastique (notamment
Hollywood Movies, ballade pour cow-boy ayant trop écouté
la FM américaine). De la vie derrière chaque titre mais
qui n'arrive pas à conclure, des superbes enchainements guitare-section
rythmique gâchés par un dribble de trop. Un je ne sais
quoi qui manque, un poil d'ordre dans l'embrouille que le trio propose
et l'injonction d'Apostrophe ne sera pas loin d'être parfaite.
Mais
les mélanges, faut pas en abuser. La preuve avec le trio américain
Caustic Casanova
approuvant la phrase précédente avec Someday You Will
Be Proven Correct, leur troisième album sur Mad Love records
en 2011. On peut venir de Washington DC et faire autre chose que du
Dischord records. On peut aussi faire de la musique qui en fout partout,
un power rock trio tellement heavy qu'il en devient franchement lourd.
Du solo de guitare, il y aura, des refrains fadasses et des sonorités
écurantes, tu t'en repaîtras. Des embardées
vers le pop-punk, le hard-rock de compétition, tu ne rechigneras
pas. Si au final, l'album parvient à tenir un équilibre
instable, c'est parce qu'il se vautre dès le début et
comme il est bien connu que pour ne pas retomber à terre, il
faut mieux rester allonger, le Casanova Caustic ne tombe pas plus bas
jusqu'au dernier des douze titres. M'étonne à moitié
que J. Robbins, avec ses projets post-Jawbox, soit derrière ce
truc libidineux.
Avec,
entre autre, un ancien Fine
China Superbone et Feverdream,
on était en droit d'attendre à de l'équarrissage
de tulipes dans les grandes largeurs. Organisms,
groupe hollandais et leur premier album Rainbow Black + White
(Scene Spirit 2012) ne représentent pas ce rayon de soleil. Ils
ont beau mettre toute leur détermination de bataves devant la
montée des eaux, lever un coin de ciel bleu sur des compos noires
à la base, installer Alex Newport derrière la table de
mixage, jongler à toute vitesse entre garage-rock et indie-rock
endiablé, le farfisa finit par vous filer mal au crane et les
dix titres passe-partout par se fracasser droit dans le mur, faute d'une
boussole vous montrant le chemin. C'est magnifique l'énergie
mais encore faut-il savoir quoi en faire.
Vous
connaissez la différence entre Appaloosa
et un tampax ? Appaloosa, c'est pour les trous du cul. Ce qui est bien
avec cette blague d'un niveau élevé, c'est qu'elle marche
avec tous les groupes que vous détestez. Défoulez-vous.
Ou mettez le cinquième album des Italiens de Appaloosa, The
Worst of Saturday Night, sous-titré Musica Per Energumeni
Del Sabato Sera (Black
Candy 2012) et dansez toute la nuit. Perso, j'adore parce que j'en
suis un vrai.
On
fait déjà moins les rigolos avec Mörse.
Ce n'est pas une série laconique de points et de tirets que Mörse
vous envoie mais une grosse patate en pleine tronche, bien ronde, bien
chaude, un signal de détresse et de rage bien râpeux. Occasionnellement,
Mörse est un nouveau groupe de Lille et ce loup sur la pochette,
qui n'a pas dû bouffer du morse depuis longtemps, est leur premier
cdep trois titres (Eastrain
records 2012). C'est du punk-hardcore viril, roulé dans le crust,
qui file droit et sans surenchères techniques. C'est beuglé
en français mais ça serait en moldave que ça serait
pareil. D'ailleurs, c'est toute la musique de Mörse qui pourrait
venir de Moldavie, d'Allemagne ou de n'importe quel coin de la planète
que ça serait pareil, partout où des hordes de zombies
assoiffés pratiquent ce genre de punk-hardcore. Malgré
le son impeccable et leur savoir-faire, les trois compos sont loin de
sublimer le genre, restent peinards dans les clous et se révèlent
finalement ordinaires. Mörse, une musique téléphonée.
Zhol,
ça ressemble à Zeuhl, ça sent la rencontre cosmique
et la mauvaise odeur du prog-rock repoussant des années 70. Autant
dire que c'est avec les pincettes et le bout du bout des doigts que
le CD est allé se faire voir dans le mange-disque. Et (hélas),
Zohl ne m'a pas donné tort. Et (bizarrement), j'ai tenu le choc.
Pas de nausée, pas envie d'aller courir écouter les Buzzcocks,
les quatre titres de ce cdep (leur deuxième sur Ocinatas
Industries) ont défilé sans sourciller. Ou presque.
On sent bien que quelques disques de prog-rock, de vieux vinyles de
branle-couilles ayant chopé l'acide de trop et/ou la grosse tête
trainent à la maison. Mais sur l'étagère d'à
coté, les disques de rock, de jazz qui dérouille ou de
Zu ne sont pas là que pour la déco. Ca vous donne un mélange
buvable, relativement succulent même parfois (j'avoue) mais si
Zohl pouvait encore plus groover, resserrer le propos, arrêter
les divagations interplanétaires, laisser refroidir le manche
de la guitare, mettre un bon coup vicieux derrière la nuque et
s'appeler mon oncle, j'accueillerais Zohl avec plaisir sur mes modestes
étagères.
Restons
dans le zouk. Le vrai, avec Ultra
Zook et un ep se nommant Epuz, en auto-production semble-t-il,
premier d'une série de trois. Là encore, ça sentait
pas bon, un mauvais pressentiment, du Zeuhl qui se cache et des courants
pas porteurs. Au final et cinq titres plus tard, ce sont surtout des
chemins de traverses empruntés la tête à l'envers.
Un trio dont la provenance géographique est aussi incertaine
que leur musique. Quelquepart en France et des bruits bizarres issus
d'un trio guitare/basse-claviers-batterie. Du Singe Blanc qui aurait
bouffé du Devo (quand un groupe semble faire n'importe quoi avec
un aspect retro-futuriste, il est toujours de bon ton de sortir de sa
manche la carte Devo), des voix pitchées, trafiquées,
une musique sans limite, le jeu de l'expérimentation et des assemblages
louches, de la douce folie, le stress en plus. Je suis plutôt
zouk béton que zouk love mais je demande à voir et à
entendre pour les deux Eps suivants, cette musique du hasard pouvant
parfois tomber du bon coté de la pièce.
L'electro
punk, c'est le furoncle de la musique. Le truc qu'il faut éclater,
là, tout de suite. Et The
White Screamed Shout est d'une taille phénoménale.
Italians do it better, c'est bien connu. Derrière ce groupe qui
n'en est pas un se cache Jack Mostro, bête de foire, un punk
3.0 comme il déclare sans ambages, qui va révolutionner
le monde sclérosé de la musique, armée d'une guitare
violemment distordue (dixit toujours), de synthétiseurs futuristes,
d'un tourbillon de rythmes electro qui ne feraient peur qu'à
votre grand-mère légèrement incontinente et d'une
philosophie de vie inspirée par Jean-Claude Van Damme. Ca vous
donne le EP six titres The Birth (Ginotonico
Productions 2012), le retour aux valeurs pures, les choses simples
de la vie, la rencontre du hardcore, le vrai, de l'electro le plus kitsch
jamais entendu bien au-delà des deux cotés des Alpes et
de la techno d'Ibiza. Au moins Sigue Sigue Sputnik avait des tenues
vestimentaires distrayantes. The White Screamed Shout, un groupe définitivement
aware.
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Apparemment, tout
le monde ne lit pas les revendications
de l'humeur massacrante. Sinon pg.lost
et Sigma Octantis
n'auraient pas pris la peine de poster respectivement les albums Key
(Black
Star Foundation 2012) et Disséminations (OPN
2012). Le post-rock dans toute sa splendeur et sa déchéance,
Mogwai, Explosions in the Sky, tout ça. Les Suédois de
pg.lost sont surement balèzes dans leur genre mais ce genre me
parle autant qu'un pingouin sur la banquise. Bâillement.
Avec Sigma Octantis, la donne est subtilement différente. Déjà,
un groupe, français de surcroit, qui tire son nom d'une étoile,
faut s'attendre à de l'ésotérisme dans les grandes
profondeurs, celles inaccessibles pour les non-initiés. Et il
est juste de dire que je ne comprends pas grand-chose à Disséminations,
troisième message d'une carrière obscure commencer par
Invocations (2007) et Dislocations en 2009. Sigma Octantis,
c'est le domaine du dark ambient, du new-age nappé de flatulences
sonores, de l'electro tellement minimale qu'on attend désespérément
que quelquechose se passe, d'un post-rock implosé de l'intérieur.
Pour un bâillement tout aussi intense.
Mais
alors, que dire de Robert
Lepenik et son album Postepeno (God
records 2012) ??!! Version snob, on dira que l'Autrichien Robert Lepenik,
ex-guitariste de Fetish 69, groupe metal-hardcore-industriel à
la fin des années 80, est enfin devenu un artiste au sens noble
du terme. Inspiré par les collages d'un malade schizophrène
aux alentours de 1890 et dont les travaux agrémentent la pochette,
Lepenik en a tiré une uvre bouleversante. Six compositions,
une heure de plongée vertigineuse dans un cerveau torturé
avec pour seuls ornements, des notes de pianos tombant au hasard comme
la maladie sur nos
pauvres âmes défaites et des tonalités utilisant
une seule même fréquence avec des modulations hyper minimales
pour compatir avec tous ceux qui souffrent dans leur chair. Version
moules de Bouchot, on dira qu'Arvo Pärt, à coté,
c'est Napalm Death. Ces putains de sifflements niquent les tympans,
tous les chiens du quartier ont cessé d'aboyer, un manchot en
ferait autant au piano et l'Autriche n'a que ce qu'elle mérite.
Un disque qui va être comme le suppositoire en restant dans les
annales.
Enfin,
je ne voudrais pas finir cette ode à l'inutile sans glisser un
mot sur l'extraordinaire bienveillance d'un groupe : Kinski
Elevator et son album They were [
] in love (Music
Unit 2011). Disque grand luxe avec pochette gatefold, vinyle trempé
dans 180 grammes d'une solidité rassurante et, compris dans le
lot, la même chose en version CD. Pas le vulgaire CDr jeté
en pâture mais le vrai digipack tout confort. Et tout ça,
ça un nom, c'est donné de la confiture aux cochons. Pas
que ce disque soit débectant, loin de là (quoique sur
quelques passages, je serre durement les fesses), mais leur mélange
de jazz, de prog-rock, de pop biscornue, de langages aventureux où
cohabitent Can, Zappa, Magma et autres dinosaures princiers de l'histoire
du rock dont je me contrefous, n'éveille en moi que très
peu d'émotions, pour rester poli, car j'ai de la déontologie,
moi Monsieur, je ne dis jamais de mal de généreux donateurs.
Tête
de Gondole (24/08/2012)